« Vous pouvez vous asseoir, monsieur Matthews. » Malgré toi, tu ne pus t’empêcher de demeurer un peu surpris du ton courtois et poli emprunté par l’homme qui se trouvait devant toi, soit ton agent correctionnel. C’était bien la première fois depuis que tu étais arrivé qu’on t’appelait ainsi, mais que plus encore, qu’on s’adressait à toi de façon polie, comme si tu étais une véritable personne. Cela ne t’était pas arrivé depuis que tu avais été mis derrière les barreaux, et même si tu étais en attente d’un procès, même si tu savais que tu n’avais rien fait, tu avais été obligé de supporter le même traitement que tous les autres détenus, soit ce traitement de dégradation où tu n’es réduit qu’au statut de prisonnier, où tu n’as même plus de nom pour les gardiens. Cependant, tu ne le relevas pas, te doutant bien que tout commentaire pourrait frôler le sarcasme, puis tu pris place dans le siège qu’on t’indiqua, attendant la suite de ses propos. Il était évident qu’il était nerveux, limite mal à l’aise de te parler, comme s’il se rendait compte que pour la première fois, il ne pouvait pas te traiter comme les autres, puisque visiblement, ton cas était loin d’être semblable à ceux des autres. Tu le laissas alors parler alors qu’il affirmait : « Je ne crois pas que c’est une surprise pour vous. Il fut conclu que votre emprisonnement était une erreur. Vous êtes innocent dans ce qui s’est passé. » Tu manquas alors de soupirer, toujours dans le désir de demeurer poli, puis tu le laissas continuer. Il ajouta : « Sachez que les services juridiques, les services correctionnels et moi-même sommes désolés de ce… contretemps. Nous allons faire notre possible pour s’assurer que votre sortie se fasse de la façon la plus agréable possible pour vous. » Et là, il commença à parler de recherche d’emploi, de services de rétablissement en société, probablement le même discours qu’il faisait à tous les détenus qui finissaient par sortir de prison. Le truc, c’est que toi, tu n’étais pas comme les autres détenus, et tu le sus bien rapidement quand il finit par dire ce que tu voulais entendre, soit : « Bien sûr, votre casier judiciaire et militaire sera vierge de toute cette histoire, et vous aurez une compensation financière. Ce sera à vous de décider ce que vous souhaitez faire avec celle-ci. » Cette fois-ci, tu laissas un petit sourire se dessiner sur ton visage. Inutile qu’on te propose quoi que ce soit, tu savais parfaitement ce que tu allais faire avec tout cela. L’entretien prit fin quelques minutes après. Tu serras la main de l’agent, puis tu quittas les yeux, n’attendant pas plus longtemps pour te rendre dans un café Internet, puis acheter un billet sur le premier vol disponible en direction d’Honolulu, Hawaii, là où tu irais retrouver ta cousine, et où tu irais passer du bon temps, comme tu avais songé à le faire depuis un bon moment maintenant. C’était une nouvelle vie qui s’offrait à toi à partir de ce moment, et une vie où tu ne souhaitais plus être coincé sous le contrôle de quiconque, sauf peut-être le tien.

----------
Tu étais parti plutôt en colère par rapport à la dernière discussion que tu avais eue avec Skye pour aller travailler. Puisque tu connaissais et que tu avais su vivre avec le caractère parfois tumultueux de ta petite-amie – qui te plaisait, malgré les disputes que cela pouvait provoquer, tu te doutais bien que cette conversation, vu l’angle d’entrée, n’allait probablement bien finir, mais à ce point, non, tu n’aurais jamais pu imaginer. Tu marchais alors droit, les poings serrés afin de ne pas commencer à trembler, et tu te dirigeais aveuglément dans le vestiaire des employés, sachant parfaitement que tu serais incapable de te concentrer. Pendant un instant, tu eus envie de ne pas aller au casino, puisque tu ne voulais quand même pas corrompre la sécurité des jeux pour tes soucis personnels, mais en même temps, pouvais-tu vraiment passer à côté de ce que tu ressentais ? C’était probablement la première fois depuis que tu étais arrivé à Hawaii que tu étais si confus, que tu savais que peu importe ta décision, pour le coup, celle-ci allait probablement complètement changer ta vie. Pourtant, aussi difficile que ce soit, tu étais prêt à prendre cette décision, et tu ne voulais pas revenir sur ce que tu avais dit à Skye précédemment. Pourquoi ? Parce que depuis plus d’un an, elle changeait ta vie, et bien souvent pour le mieux. À maintenant trente ans, tu pensais être assez vieux pour savoir ce que tu voulais, pour avoir une vie stable, et le fait que tu t’étais installé avec elle tout récemment ne faisait que te confirmer cela. Malheureusement, tu n’avais pas été assez doué pour lui faire part de tes intentions clairement, ce qui menait à ce froid que tu ne saurais pas laisser durer bien longtemps. En fait, tu ne voulais tellement pas lâcher l’affaire que finalement, tu décidas de dire que tu avais une urgence, que tu ne pouvais pas travailler. Tu quittas le vestiaire, et tu te rendis dans les boutiques de l’hôtel où tu travaillais, déboulant en trombe dans la bijouterie à quelques minutes de sa fermeture. Par chance, tu connaissais bien l’employé qui se trouvait là, et bien rapidement, tu pus lui demander ce que tu cherchais, à savoir les plus jolies bagues qu’il avait à vendre. Sachant que tu empiétais grandement sur son temps de repos, tu t’estimas chanceux d’avoir le coup de cœur pour l’une d’entre elles bien rapidement. Ce n’était pas une bague hors de prix, mais sans comprendre pourquoi, tu te disais qu’elle allait sûrement l’aimer, tu l’espérais, en tout cas. Tu payas alors le contenu précieux, le mit tout de suite dans ta poche, et sans attendre plus longtemps, tu retournas à la résidence, espérant simplement que cette confrontation avec ta petite-amie – et ton destin – allait jouer en ta faveur, puisque pour tout dire, tu ne te verrais plus vivre sans elle, plus maintenant.